Extrait
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L’égoïste

Alain Gagnol, Jean-Loup Felicioli

1996 - 4 minutes

France - Animation

Production : Folimage

synopsis

Le héros porte l’adjectif d’égoïste comme un blason et le revendique bien haut. Lorsqu’un accident le différenciera tout à coup de son double, du "miroir humain" qu’est sa compagne. Ce film est une farce grotesque sur l’égoïsme humain poussé à l’absurde.

Alain Gagnol

Alain Gagnol est né le 13 mai 1967 à Roanne (Loire). Romancier, scénariste et réalisateur de cinéma d'animation, il est passé par l'école Émile-Cohl, à Lyon, avant de travailler comme animateur aux studios Folimage à partir de 1988.

Il collabore pour la première fois avec Alain Gagnol sur L'égoïste (1996), avant une série conçue à quatre mains pour Arte et Canal+ tout à la fois : Les tragédies minuscules. Un couteau dans les fourchettes (1999) en fait partie.

Le duo poursuit sa collaboration sur Le nez à la fenêtre (2001), Le couloir (2005) et Mauvais temps (2006). Leur premier long métrage, Une vie de chat (2010), est un succès, obtenant même une nomination aux Oscars.

Le suivant, Phantom Boy, sort en 2015, tandis que les deux réalisateurs reviennent parallèlement au format court par le biais du polar Un plan d'enfer (2015), suivi du Chat qui pleure en 2018.

Alain Gagnol signe en solo un court métrage en prises de vue réelle en 2019 : La solitude est un animal de compagnie.

En 2023 sort un nouveau long métrage du tandem Felicioli-Gagnol, à l'attention des jeunes audiences : Nina et le secret du hérisson

Gagnol a également coécrit Sirocco et le royaume des courants d'air de Benoît Chieux, dont la sortie en salles en France est fixée au 13 décembre prochain.

Jean-Loup Felicioli

Neé le 18 juillet 1960 à Albertville (Savoie), Jean-Loup Felicioli a étudié aux Arts décoratifs de Strasbourg, puis aux Beaux-Arts à Annecy et à Perpignan, avant de travailler dans un atelier de restauration à Valence et de pratiquer la sculpture, la peinture et la réalisation. Il se rapproche ainsi des studios Folimage, d'abord comme animateur, puis en tant que réalisateur, à travers un premier court métrage d'une durée de deux minutes, utilisant la pâte à modeler, en 1989 : Sculpture/sculptures. Une nomination au César du meilleur court métrage d'animation salue ce coup d'essai.

En 1992, il coréalise avec Jacques-Rémy Girerd un court métrage appelé à un beau succès : Le Wall. Il travaille ensuite pour la première fois avec Alain Gagnol sur L'égoïste (1996), avant une série conçue à quatre mains pour Canal+ : Les tragédies minuscules. Un couteau dans les fourchettes (2000) en fait partie.

Le duo poursuit sa collaboration sur Le nez à la fenêtre (2001), Le couloir (2005) et Mauvais temps (2006). Leur premier long métrage, Une vie de chat (2010), est un succès, obtenant même une nomination aux Oscars.

Le suivant, Phantom Boy, sort en 2015, tandis que les deux réalisateurs reviennent parallèlement au format court par le biais du polar Un plan d'enfer (2015), suivi du Chat qui pleure en 2018.

En 2023 sort un nouveau long métrage à l'attention des jeunes audiences : Nina et le secret du hérisson.

Jean-Loup Felicioli a été également crédité comme directeur artistique sur La prophétie des grenouilles, de Jacques-Rémy Girerd, en 2003.

Critique

En 1990, un film publicitaire signé Jean-Paul Goude, devenu fameux, pour un parfum emblématique d’une grande marque, montrait des femmes s’égosillant à l’attention d’un personnage masculin, depuis les balcons d’un hôtel : “Égoïste !” Avant l’avènement d’Internet et des réseaux sociaux, qui depuis ont établi ce bien vilain défaut en valeur-étalon, il y avait quelque chose de visionnaire dans le cri, que le premier film d’animation réunissant Jean-Loup Felicioli et Alain Gagnol venait peu après (en 1996) creuser de manière décapante.

L’égoïste, ce court métrage d’une durée inférieure à quatre minutes, présélectionné pour les César 1997 (il n’y avait alors plus de catégorie animation spécifique), commence d’ailleurs par un carton posant les choses, avec pour seul mot un “Moi” en majuscules rouges sur fond jaune.

Le protagoniste du film, dont l’apparence physique traduit l’inspiration avouée de Felicioli à l’égard de l’œuvre de Modigliani, se repait de son individualisme, et même du véritable culte qu’il se porte. Autocentré, égocentrique, “amoureux de lui-même” lorsque son pendant féminin – “Elle” – entre dans sa vie, au gré d’un hasard, dans la rue. Il ne se lance du reste dans cette relation amoureuse que parce qu’elle le lie à son double présumé, lui ressemblant trait pour trait. Là encore pourra-t-on extrapoler sur une préfiguration des futures applications de rencontres triant les profils selon les points communs des inscrits…

Évidemment, le grain de sable glissé par les aléas de la vie changera vite ce destin de félicité autosatisfaite, à travers un accident de la route et un visage défiguré exigeant une réparation, brutale et sauvage, résonnant à son tour sur le motif des violences conjugales et de la violence masculine potentiellement sanglante, ce dont les mentalités se souciaient encore peu dans les années 1990.

La fable narrée, parfait prélude à la série des Tragédies minuscules dans laquelle le tandem de réalisateur devait se lancer dans la foulée, joue cette carte de l’absurde, sinon du grotesque, pour ridiculiser les éternels excès de la nature humaine, dans une grande tradition hexagonale remontant à Rabelais, Molière et La Fontaine. L’ultime plan, ironiquement placé sous le signe du “Nous”, laisse entrevoir la vanité des choses, une fois la vieillesse venue et les visages abimés – en plus – par les outrages du temps. Au bout du voyage, le choix de l’égoïsme n’aura débouché que sur une voie sans issue.

Christophe Chauville

Réalisation : Jean-Loup Felicioli et Alain Gagnol. Scénario : Alain Gagnol. Montage : Christine Renaud. Son : Jean-Claude Millet. Voix : Jean-Paul Racodon. Musique originale : Serge Besset. Production : Folimage.

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