Brûle
Elvire Muñoz
2019 - 23 minutes
France - Fiction
Production : 10:15! Productions
synopsis
Maya est en apprentissage dans un atelier de soudure. Elle aime bien sa patronne, peut-être un peu trop. Le jour où elle se blesse, elle décide de ne rien dire pour préserver l’entreprise. Mais quand elle découvre qu’elle se fait manipuler, Maya décide de se faire justice elle-même...
biographie
Elvire Muñoz
Après un Master Cinéma et audiovisuel à Nanterre et un Master en scénario à l’Insas, en Belgique, Elvire Muñoz fait la rencontre de l'équipe de 10:15 ! Productions, avec qui elle développe ses deux premiers films en tant que réalisatrice.
Elle met ainsi en scène Lyna Khoudri et Adeline d’Hermy dans son court métrage Brûle, qui débute sa carrière à Palm Springs et à Rhode Island avant de la poursuivre dans plusieurs festivals français et internationaux, parmi lesquels ceux de Brest et Contis, ainsi que le BSFF à Bruxelles.
Elle développe actuellement son deuxième court, Goutte, ainsi qu’un projet de long métrage, Rue des Cloÿs, avec Mondina Films, en continuant de s'interroger dans son travail sur l’entrelacement entre désir, travail et différences de classes.
Avec son co-auteur, Étienne Chédeville, elle écrit aussi pour la télévision. Notamment Alice & Lewis, une série d’animation diffusée sur TF1, Garou, une comédie horrifique en développement chez Scarlett Productions ou encore Gangsystem, un “teendrama” produit par La Onda.
Critique
À l’heure où les films de femmes sont plus que jamais à l’honneur, on (re)découvre avec plaisir et intérêt ce court métrage d’Elvire Muñoz, subtil mélange entre film social et revenge movie, teinté d’érotisme lesbien. Entremêlant habilement les différents affronts subis par une jeune femme, Brûle nous embarque dans l’ivresse de l’accumulation des violences : domination de classe, cruauté du déséquilibre dans le rapport de séduction, dureté des conditions de travail au bas de la chaîne… Autant de coups durs qui se ressentent, s’’immiscent et s'imprègnent jusque dans les chairs, jusque dans les corps.
Celui de Maya d’abord, jeune femme que l’on découvre en mouvement. Maya – interprétée par Lyna Khoudri – se faufile dans le hangar de l’usine jusqu’à son poste, agile et déterminée, rapidement à la manœuvre sous son masque de soudure, chalumeau à la main. Elle est épaulée par son formateur (Steve Tientcheu), robuste et précis, encourageant. Le troisième corps à faire son apparition contraste avec les deux précédents : veste de tailleur et décolleté plongeant, maquillage et sourire angélique, Adeline d’Hermy incarne la patronne, d’une sensualité que l’on devine mesurée pour créer juste ce qu’il faut de désir de proximité avec ses employé(e)s.
Devant la caméra fluide et attentive de Julia Mingo, captant dans un mouvement global l’ambiance lourde des non-dits autant que la chaleur pesant sur les lieux et les esprits, le trio d’interprètes, savamment choisis et dirigés, déploie un jeu subtil. Il y a le corps de Maya, meurtri mais en lutte, et tous ces petits gestes autour : la manière délicate dont la patronne lui ôte son vêtement de travail avant l’arrivée dans la salle d’attente de l’hôpital, la solidarité évoquée dans une presque caresse, l’évitement blessant et le mouvement de recul glacial au moment où l’entraide semblait offerte et à portée de main.
Elvire Muñoz nous embarque dans cette fuite en avant loin des clichés. Aucune sororité, malgré l’attirance entre les deux femmes ; ici, la domination de classe et la manipulation l’emportent. Le désir sensuel et la soif de vengeance motivent Maya autant qu’ils la consument. Loin de la résilience, Elvire Muñoz nous présente une héroïne à la dérive, dans un mouvement de résistance assumée jusqu’à la rage et à la destruction.
Marie-Anne Campos
Réalisation et scénario : Elvire Muñoz. Image : Julia Mingo. Montage : Céline Canard. Son : Jules Valeur, Grégoire Chauvot et Lucien Richardson. Musique originale : François Beaury. Interprétation : Lyna Khoudri, Adeline d'Hermy et Steve Tientcheu. Production : 10:15! Productions.
