Cahier critique 17/10/2018

"L’ours noir" de Xavier Seron et Méryl Fortunat-Rossi

Court mais trash !

Méfiez-vous des ours en peluche dans ce film plus vrai que nature signé Xavier Seron et Méryl Fortunat-Rossi. Que donnent un naturiste, un musicien, une blonde surtout pas raciste et un couple gay dans une forêt ? Une équipe de bras cassés, ou plutôt arrachés. Dans la nature si calme et si douce, nos cinq aventuriers avancent inconscients du danger, inconscients tout court.

Présomptueux, l’homme veut communier avec la nature, comme s’il pouvait avoir la mainmise sur elle. Dans sa croyance éternelle qu’il lui est supérieur, l’homme ne s’en méfie pas. Il va être bien puni.

En parodiant le film d’horreur (voire carrément gore) classique, L’ours noir tourne en ridicule l’être humain bête et radin dans toute sa splendeur. Dès les premières minutes, la musique aux notes légèrement discordantes contraste avec le long et large plan bien net d’introduction. La différence entre le calme de la forêt et l’humour lourd des envahisseurs nous le montre bien : l’homme dérange. Il va réveiller l’ours qui dort. Alors commence une série de gags sanguinolents et absurdes. Les victimes de l’animal meurent sous les yeux hébétés des copains inactifs qui observent en spectateur. Comme dans tout film d’horreur, personne ne réagit et les blessures les plus atroces n’engendrent pas la mort. Alors que les attaques continuent (pour notre honteux plaisir), le rythme du film ne s’accélère pas, mais, au contraire, prend son temps, de la même manière que le surnommé Nietzsche prend le temps de négocier le prix d’un spray aérosol qui pourrait sauver son ami.

Surplombant le tout, une voix off guide nos cinq amis, essayant vainement de leur faire respecter les règles pour ne pas se faire attaquer. Avec détachement et dérision, elle les gronde gentiment et donne des conseils… pas si avisés. Elle est un des traits de génie des réalisateurs qui nous mènent dans tout le film de surprise en surprise. Leur autodérision dessine un sourire sur nos lèvres – mais un sourire horrifié, tout de même.

Anne-Capucine Blot

  • Réalisation et scénario : Xavier Seron et Méryl Fortunat-Rossi. Image : Thierry Godefroy. Montage : Émilie Morier. Son : Pauline Lagache et Marie Paulus. Musique originale : Erwann Chandon et Thomas Barrière. Interprétation : Jean-Benoît Ugueux, Jean-Jacques Rausin, Catherine Salée, Terrence Rion, François Neycken, François Ebouelé, Philippe Grand'Henry. Voix off : Fred Rioux. Production : Origine Films / Hélicotronc.

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Entretien avec Méryl Fortunat-Rossi et Xavier Seron – Les nuits en or