Extrait
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Azurite

Maud Garnier

2015 - 25 minutes

France - Fiction

Production : Offshore

synopsis

Salomé, quinze ans, travaille dans l’atelier de son père, un peintre célèbre pour son bleu. Mais voilà quelques temps que le peintre, trop âgé, n’est plus capable de fabriquer sa fameuse couleur, mettant en péril son atelier. Salomé se met alors à espérer que son père lui transmette son secret.

Maud Garnier

Maud Garnier a obtenu un Master 2 professionnel d’études audiovisuelles et cinématographiques, spécialité réalisation, à l'ESAV de Toulouse en 2008, vécu un temps à Londres et intégré le Conservatoire européen d’écriture audiovisuelle (CEEA), à Paris.

Elle a réalisé en 2010 L'absente, un court métrage de 10 minutes montré à la Rencontres cinématographique de Digne-les-Bains, puis Quinze francs, des fleurs et une culotte (2013), produit par Offshore et sélectionné à Brest, Gindou, Saint-Paul-Trois-Châteaux, Saint-Jean de Luz, etc.

L'année suivante, Maud Garnier signe Azurite, co-écrit avec Marie-Sophie Chambon et de nouveau produit par Offshore. Le film obtient le Prix de la presse au Festival du film court en plein air de Grenoble en 2015.

Faisant partie du collectif des Indélébiles, qui réunit des scénaristes souvent également passés à la réalisation (comme Clémence Madeleine-Perdrillat, Alice Vial, Laure Desmazières, etc), elle a obtenu en 2011 le Prix Sopadin Junior pour un projet de premier long métrage, un film historique intitulé La peau claire.

Elle a aussi travaillé pour la télévision (elle a notamment écrit un épisode de Germinal en 2021) et la production de séries animées. 

Critique

Pour un film qui doit son nom à un bleu, il y est finalement peu question de peinture, et l’on y cherche un peu la couleur. Et pour cause, le fameux bleu azurite se fait désirer. Salomé attend que son père lui en donne le secret de fabrication avant qu’il n’en soit plus capable. Elle, souvent baignée de lumière, pleine d’espoir, fait tout ce qui est en son pouvoir pour le convaincre lui, dont les joues palissent à vue d’œil, lui que l’ombre gagne un peu plus chaque jour – ou chaque plan…

Azurite est une histoire intime sur les secrets de la peinture, si bien gardés. Ce court métrage se déroulant au XVIIe siècle donne un caractère sacré à cet art, de toute façon étroitement lié à la religion. Des chants résonnent sur des détails de tableau, le grain de la toile, le trait d’un pinceau, les nuances du bleu. Puis, toutes les séquences qui suivent cette ouverture “détricotent” méthodiquement le mysticisme. C’est là que Maud Garnier attrape le spectateur. Le film rappelle à plusieurs reprises que la peinture est aussi un commerce. Il faut satisfaire des commandes pour en vivre. C’est aussi une technique. De dessin, certes : il faut savoir où s’arrête la courbe d’une hanche, pouvoir la reproduire. Mais aussi des techniques de chimie, de physique. Comment tendre une toile ? Comment mélanger les pigments, avec quelle huile, grâce à quel outil ? L’art de peindre est une science qui a une odeur, qui salit les mains. Comme savoir-faire, il s’apprend et se transmet.

Logiquement, Azurite est donc également une histoire d’héritage. Mais pour qui ? Certainement pas pour une femme, réduite à apprendre le dessin en lorgnant les modèles par un trou dans le mur. Salomé est pourtant la propre descendance du peintre. Elle a tout appris de lui, arrive parfois même à lui arracher un compliment. Elle trime et rêve de lui succéder. En vain. Son père continue à chercher un apprenti, alors qu’il en a une sous les yeux. Parce que la gente féminine alors – comme encore trop souvent aujourd’hui – n’avait pas droit à l’erreur. Maud Garnier peint avec justesse une nouvelle histoire de femme réprimée par la société. Il n’y a pas de traitement particulier pour filmer l’époque. Passées les notes musicales du début, le silence s’impose, les bruits sonnent comme des coups de fouet ou des sifflements. C’est un réel brut. Brutal. Comme quand on jette les rêves d’une jeune fille aux égoûts à cause de son genre. L’espèce de banalité de ton de la réalisatrice pointe du doigt un combat qui date, mais qui n’est pas gagné. On lui en veut un peu de la piqure de rappel, mais surtout, on l’en remercie.

Anne-Capucine Blot

Réalisation et scénario: Maud Garnier. Image : Bertrand Artaut. Montage : Tuong-Vi Nguyen Long. Son : Ludovic Élias, Mathieu Vigouroux et Olivier Guillaume. Interprétation : Alba Gaïa Bellugi, Alain Rimoux et Anthony Bajon. Production : Offshore.

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