Livres et revues 13/05/2017

Il était deux fois Jacques Prévert

Carole Aurouet, vient de publier deux ouvrages consacrés à Jacques Prévert. Elle anime deux dimanches de Varan (14 et 21 mai) autour de la place du poète dans le cinéma et de celle de Paris dans son œuvre.

« Paris est tout petit pour ceux qui s'aiment comme nous d'un aussi grand amour. » « Moi, j'ai dit bizarre?... Comme c'est bizarre ! » « T’as d’beaux yeux, tu sais. » On a tous quelque chose de Prévert, la saveur de dialogues, des souvenirs d’école pour la découverte de sa poésie. Il a disparu il y a quarante et, profitant de ce chiffre rond, on célèbre sa mémoire.

Carole Aurouet, universitaire, a consacré une bonne part de ses recherches au poète-scénariste et publie deux livres excellemment documentés. La biographie, Jacques Prévert, une vie, balaie son existence en séparant les axes de ses activités simultanées qui commencent à peu près toutes en même temps au début des années trente : le cinéma, la poésie, la chanson.

Auparavant, on découvre son enfance – il jouait dans un bac à sable avec un petit garçon aux cheveux bouclés, Louis Aragon et il fut un bon élève –, le goût de la lecture de ses parents et du cinéma, les difficultés financières, le père une fois au bord du suicide, la complicité avec son frère Pierre, la rencontre, au service militaire, avec Georges Duhamel – c’est Prévert qui trouvera plus tard le titre de la collection « Série noire » – et Yves Tanguy qui n’était pas encore le peintre surréaliste qu’il deviendra.

Prévert, ce « voyou au visage pâle », comme le qualifiait Michel Leiris, a appartenu au groupe conduit par André Breton de 1925 à 1929, s’en excluant en 1930 en cosignant un pamphlet contre le « pape du surréaliste ». Mais c’est avec sa participation à cette troupe de théâtre qui prend le nom de Groupe Octobre que son talent de plume devient perceptible.

Dans ses deux livres, Carole Aurouet souligne à quel point les phrases de Prévert qui, avec ses mots de tous les jours, semblent couler de source sont le fruit d’un travail conséquent. Les manuscrits qui subsistent en portent la trace. Ils révèlent aussi des surprises. Dans le scénario de Quai des brumes, la fameuse réplique était : « Tu as de jolies jambes tu sais ». Aurait-elle eu la même postérité ?

Prévert et le cinéma évoque la place du cinéma dans la vie de Prévert, dès sa jeunesse comme spectateur, sa passion pour Feuillade, comme figurant dans un film d’Henri Fescourt et comme le moteur de ses premiers écrits, poèmes et brefs scénarios, couchés sur le papier à la fin des années 1920, longtemps inédits et matrice de l’œuvre future.

La troupe du Groupe Octobre constitue un autre élément déclencheur, à l’origine du premier court métrage de fiction réalisé par son frère Pierre, L’affaire est dans le sac (1932), tourné dans les décors de La merveilleuse journée, d’Yves Mirande et Robert Wyler, et où on croise, entre autres, Marcel Duhamel, Jacques Prévert, Julien Carette et Jacques-Bernard Brunius, qui, dans une scène mémorable, veut acheter un « béret français ».

Puis ce fut la rencontre avec Marcel Carné, Jean Renoir (Le crime de Monsieur Lange), Jean Grémillon. Mais, à côté de ces nombreux titres célèbres, Prévert a collaboré à bien d’autres scénarios, en tout ou partie, sans être crédité. Carole Aurouet a suivi leurs traces et évoque quelques uns des projets avortés du si prolifique Prévert.

L’auteure est aux Dimanches de Varan les 14 et 21 mai, à l’heure de la messe, pour évoquer Prévert et le cinéma.

Jacques Kermabon

Carole Aurouet, Jacques Prévert, une vie, Les Nouvelles Éditions, 2017, 10 euros.

Carole Aurouet, Prévert et le cinéma, Les Nouvelles Éditions, 2017, 10 euros.

 

Les Dimanches de Varan ont lieu 6, impasse de Mont-Louis 75011 Paris, à 10h. 5 euros la séance, café et croissants offerts.