En salles 20/05/2019

“Une part d’ombre”, premier long métrage de fiction de Samuel Tilman

Hors de l’actualité cannoise, ce thriller psychologique wallon – qui sort en salles cette semaine – vaut le coup d’œil, ne serait-ce que pour l’impeccable prestation de son comédien principal, Fabrizio Rongione.

L’ombre d’un doute... Un titre éminemment hitchcockien qui colle d’évidence parfaitement à cette production belge francophone présentée – et même primée – au Festival du film policier de Beaune il y a quelques semaines, avant de sortir en salles au cœur de la seconde semaine de Barnum cannois, pour une contre-programmation assez recommandable. 

Un peu à la façon du personnage joué par Pio Marmaï dans le récent Mais vous êtes fous d’Audrey Diwan, David est à la fois un compagnon et un papa idéal, mais qui dissimule en réalité une face plus obscure. Pas de dépendance à la cocaïne pour lui, mais une enquête policière dans laquelle il se retrouve embarqué après qu’un corps a été découvert dans une petite localité des Ardennes où il passait un week-end entre potes. Il faisait même son footing quand il a été vu en train de parler à la victime et, de simple témoin, il devient suspect au fur et à mesure que des secrets le concernant se font jour… Habile trame narrative, que le réalisateur Samuel Tilman parvient à rendre crédible à chaque rebondissement, même si une mécanique de scénario domine, presque immanquablement… Ce qui n’empêche nullement la cristallisation progressive d’une atmosphère touffue (à l'instar des forêts des environs de la scène de crime) et mystérieuse. Fabrizio Rongione, dont le capital sympathie s’avère toujours immédiat (voir aussi son travail avec Fabien Gorgeart), apporte un relief tout particulier à son personnage, plus ambigu qu'à l'apparence. L'acteur avait déjà été dirigé, sur un registre sensiblement différent, par Samuel Tilman, dans Voix de garage, un court métrage de 2007 offrant une variation assez drôle de querelle entre anciens amoureux désunis.  

 

 

 

 

 

 

 


Également producteur (citons à ce titre, entre autres, Ça rend heureux, de Joachim Lafosse, ou Mobile Home de François Pirot), et réalisateur de documentaires ou de docu-fictions pour la télévision, Tilman avait aussi signé un autre court métrage, sacrément efficace, en 2010 : Nuit blanche. Il y mettait en scène un employé d’un service d’aide aux randonneurs de haute montagne gardant au téléphone le lien avec un trio de jeunes gens coincés dans les sommets à la tombée de la nuit et du grand froid. Très investi dans sa mission, le sauveteur guidant son équipe de secours entrait en totale empathie avec son interlocutrice, une jeune fille de plus en plus paniquée et le suspense, déjà, était vite prenant. C'est à nouveau le cas aujourd’hui à travers Une part d’ombre, ce qui rassure quant à la faculté des nouvelles générations à réinvestir le cinéma de genre dans leurs premiers projets de long métrage, en Belgique peut-être plus encore qu’en France.

Christophe Chauville
 


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