En salles 26/04/2019

“Aujourd’hui, rien”, de Christophe Pellet : journaux intimes

Le premier (court) long métrage de Christophe Pellet, sorti le 24 avril, est placé sous la double tutelle de Cesare Pavese et de Jean-Luc Lagarce.

Aujourd'hui, rien... Loin de la formule, historiquement restée célèbre, que Louis XVI aurait couchée dans son journal au lendemain de la prise de la Bastille, ce sont d'autres journaux intimes, plus passionnants sans doute, qui ont intéressé Christophe Pellet pour son premier long métrage. Après 6 courts et moyens métrages, celui qui a signé aussi de nombreuses pièces pour les planches a conçu un essai très personnel, d'une durée réduite à 1h10 et qui mêle différents éléments narratifs. La base de son projet, ce sont évidemment des extraits des journaux personnels de Cesare Pavese et de Jean-Luc Largarce, tous deux disparus prématurément, l'écrivain antifasciste italien s'étant suicidé en 1950, à l'âge de 42x ans, suite à une déception sentimentale, tandis que le second a été emporté par le sida, à 38 ans, en 1995.

Des extraits de cette double production écrite s'incrustent directement dans le champ, selon une suite de dates s'échelonnant sur deux périodes différentes, bien sûr, tandis que le réalisateur filme des scènes de son propre quotidien – et de sa solitude –, des représentations charnelles d'un couple d'hommes et aussi et surtout des chats, beaucoup de chats, en France et ailleurs. Le collage fait ainsi entrer au cœur même du paysage mental de l'artiste, influencé par ces deux figures tutélaires au destin tragique et avec qui des liens se créent, multiples et naturels. On se rappelle alors, entre autres, que le motif du suicide marquait déjà le court métrage Plus dure sera la chute, en 2014, tandis que des plans d'un couple dans un parc baigné de soleil font écho à ceux qui constituaient les 5 minutes de Weinberg, en 2014. 

Admiré d'un réalisateur tel que Yann Gonzalez, ce cinéma d'écrivain, l'une des références de Pellet lui-même, n'est évidemment pas grand public, Aujourd'hui, rien étant même interdit aux moins de 16 ans, mais il n'en conduit pas moins vers d'autres rivages, littéraires, visuels ou sensitifs. Il est à l'affiche, cette semaine, au Luminor-Hôtel de Ville et à L'Archipel à Paris (plus d'infos ici).

Christophe Chauville

Deux DVD des courts et moyens métrages de Christophe Pellet sont disponible dans la collection “Jeune cinéma français” de L'Harmattan Vidéo (numéros 1 et 2).