Cahier critique 29/05/2019

“Le monstre de Nix” de Rosto

Un conte musical baroque, avec les voix de Tom Waits et Terry Gilliam.

Rosto avait en tête, vers 2005, le projet d'un film pour enfants et une comédie musicale. Des choses difficilement imaginables pour ceux qui connaissaient son travail et son univers sombre et métaphysique dans lequel évoluaient avec peine Diddybob et Buddybob, les héros de la trilogie Mind My Gap, que clôt le magistral Jona/Tomberry. C’est au dernier Festival d’Annecy qu’on l’a retrouvé avec Le monstre de Nix, notre curiosité aiguisée par une série d’affiches alléchantes reprenant les nombreux personnages du film, et toujours cette même question “Est-il le monstre de Nix ?”. C’est bien un film musical que l’on a découvert, un conte didactique dans lequel Willy, un jeune garçon, part à la recherche de sa grand-mère, kidnappée par le mystérieux monstre de Nix. Si Diddybob et Buddybob ne sont plus de la partie, on y retrouve l’univers du réalisateur et ses figures fétiches : l’enfant-sirène, toujours professant, les êtres-arbres à grand nez, protecteurs, et quelques clins d’œil. Le scénario, lui, est beaucoup plus traditionnel que les précédents, bien qu’il conserve cette dose de mystère, voire de mysticisme, qui fait sa marque de fabrique.

Dans la lignée visuelle de ses précédentes réalisations, et de celles de son coproducteur Autour de minuit, mixant les techniques, Rosto met l’accent sur l’intégration de visages 3D sur des acteurs réels. Ce procédé avait été récemment largement utilisé par Spike Jonze pour Max et les Maximonstres, une autre fable initiatique. Le monstre de Nix apparaît comme un croisement entre Alice au pays des merveilles et L’histoire sans fin, avec son monde parallèle, son néant et ses personnages merveilleux. Les personnages qui, justement, ont été utilisés pour la promotion du film, font des apparitions que l’on aimerait plus conséquentes. En voyant Le monstre de Nix, l’impression est forte de regarder un long métrage qui aurait été réduit à trente minutes. Rosto a gardé l’essentiel, mais on aimerait pouvoir se plonger plus profondément dans ce monde de Nix, en savoir plus sur ses habitants, et notamment sur l’hirondelle monstrueuse aux mains humaines qui emprunte sa voix à Tom Waits.

Le monstre de Nix nous laisse sur notre faim, au bon sens du terme, et on attend avec impatience la prochaine fable, qui, peut-être, nous en dira plus. 

Cécile Giraud

Article paru dans Bref n°99, 2011.

Réalisation et scénario : Rosto. Effets visuels : Claudius Gebele et Sébastien Fauchère. Animation : Martijn Paasschens, Paulien Bekker, Denis Briant et Patrick Chin. Compositing : Daan Spruijt et Neda Gueorguieva. Montage : Rosto et Nicolas Schmerkin. Son : Tom Hambleton. Directeur artistique : Tomvan Gestel. Musique : Rosto, interprété par Metropole Orkest. Voix : Joe Eshuis, Terry Gilliam, Tom Waits, Olivia Merilahti et The Residents. Production : Studio Rosto A.D., Autour de minuit production et CinéTé.

Rencontre avec Rosto, réalisateur de Le monstre de Nix – Festival de la Fête de l'animation 2014 :