Cahier critique 09/01/2019

“La règle de trois” de Louis Garrel

Louis Garrel pour la première fois devant et derrière la caméra – Prix Jean-Vigo 2012.

Après Mes copains (2008) et Petit tailleur (2010), Louis Garrel récidive avec un troisième court métrage au titre tout trouvé, La règle de trois, présenté au Festival de Locarno 2011 et Prix Jean-Vigo 2012 du court métrage. Une nouvelle fois, l'acteur/réalisateur explore les problématiques de l'amitié entre hommes et de son influence sur leurs rapports avec les femmes. Louis (Louis Garrel, qui joue pour la première fois dans l'un de ses films) va chercher Vincent (Vincent Macaigne) après un séjour à l'hôpital psychiatrique Sainte-Anne, suite à une probable tentative de suicide. Mais très vite, Louis se trouve tiraillé entre la femme qu'il aime, Marie (Golshifteh Farahani), qui a besoin de lui, et son ami à la dérive. L'amitié est donc mise à l'épreuve de l'amour, et vice-versa. Qui choisir dans cette situation où l'amoureuse et l'ami ne peuvent pas coexister ? Et surtout, faut-il choisir ? Malgré cette relation triangulaire, les personnages sont la plupart du temps filmés par deux, et souvent en plan large, ce qui renforce la proximité des duos en écartant le tiers.

Ces personnages malheureux, qui parlent de tout, de rien, de Bergman et de la vie, mais aussi leur errance dans Paris ne sont pas sans rappeler certains personnages des films de Christophe Honoré. Après Petit tailleur, dont le noir et blanc apparaissait comme un hommage à son père, Philippe Garrel qui l'a mis en scène souvent en noir et blanc (Les amants réguliersLa frontière de l'aube...), Louis Garrel semble ici faire un clin d'œil à celui qui l'a dirigé dans six films ; clin d'œil encore un peu plus appuyé quand se font entendre piano et violoncelle dans une partition signée Alex Beaupain, compositeur fétiche d'Honoré.

Mais la règle de trois, en mathématiques, est une équation à une inconnue. L'inconnue, ici, est Céline, l'éternelle absente, la compagne de Vincent, qu'il ne cesse d'attendre, dont il ne cesse de demander des nouvelles à Louis. Jusqu'à ce qu'elle finisse par appeler... Un appel qui viendra à nouveau bousculer les rapports de force entre Vincent, Louis et Marie.

Cécile Guthleben

Article paru dans Bref n° 103, 2012. 

Réalisation et scénario : Louis Garrel. Image : Denis Gaubert, Benjamin Rufi et Charles Cornier. Montage : Marie-Julie Maille et Marie Estelle Dieterle. Son : Mathieu Descamps. Musique originale : Alex Beaupain. Interprétation : Golshifteh Farahani, Vincent Macaigne et Louis Garrel. Production : Chaya Films.