Cahier critique 12/12/2018

"J’attends Daniel pour peindre" de Nathalie Donnini

Une comédie légère sur la confusion et l’ambivalence des sentiments de trois amis.

La comédie sentimentale se porte bien, merci pour elle. De facture assez classique, J'attends Daniel pour peindre emprunte certes des sentiers balisés, mais parvient, grâce à une belle alchimie, à nous attendrir et à nous toucher. Car les questions abordées ici le sont avec une sincérité indiscutable.

La frontière trouble entre l'amitié et le sentiment amoureux trace en effet la ligne narrative de J'attends Daniel pour peindre. Olivier finit par coucher avec Marie, la copine de son meilleur ami, une attirance réciproque, qui se traduisait jusqu'alors par une équivoque relation complice, se faisant enfin jour après plusieurs années de refoulement. Quand Marie annonce à Olivier qu'elle a quitté Daniel, celui-ci trouve enfin le courage de lui dévoiler ses sentiments. Les scènes les plus réussies sont alors celles où, amusés, ils voient l'amour contaminer le champ de leur amitié, ce basculement d'un sentiment à l'autre se traduisant par l'irrésistible fou rire de Marie quand Olivier commence à l'embrasser.

L'important, c'est que ni le vaudeville ni le pathos n'ont cours ici. Les mouvements du cœur n'y sont pas des postures théoriques servant à générer le rire ou les pleurs, ce sont des choses qui arrivent, voilà tout. Et les personnages ne savent jamais vraiment où ils en sont. Ils ressentent des émotions dont ils ne savent finalement pas quoi penser (voir le sentiment de culpabilité d'Olivier vis-à-vis de Daniel).

Nathalie Donnini va finalement prendre le parti d'en rire dès lors que ledit Daniel entre en scène. Le scénario reprend alors le dessus et oriente le film dans le registre de la comédie, l'incompréhension de Daniel (Philippe Rebbot, très drôle) face aux maladroites tentatives d'explications d'Olivier prêtant avant tout à sourire.

Avec ce film que les plus ronchons trouveront symptomatique d'une certaine tendance du jeune cinéma français, nous constatons simplement que les histoires les plus simples, quand elles sont servies par une excellente interprétation, peuvent aussi s'avérer les plus touchantes.

Stéphane Kahn

Article paru dans Bref n°49, 2001.

Réalisation et scénario : Nathalie Donnini. Image : Pascal Lagriffoul et Elsa Bennett. Montage : Anouck Zivy. Son : Frédéric Bobillier. Interprétation : Philippe Rebbot, Judith Rémy, Patrick Lizana et Katia Mari. Production : Paraiso Production.