Cahier critique 15/05/2019

“Basses” de Félix Imbert

Sélectionné à la Quinzaine des réalisateurs en 2018.

Après un court séjour en hôpital psychiatrique, Théo s’enfuit avec son ami Logan à la recherche d’une rave-party dans les montagnes. Sans indications précises sur le lieu de la soirée, les deux jeunes garçons progressent dans la forêt, attentifs aux basses qui doivent guider leur chemin.

Basses : le titre de ce premier film de Félix Imbert, présenté à la Quinzaine des réalisateurs en 2018 et au dernier festival Premiers plans d’Angers indique bien au spectateur combien son entrée dans ce petit village en altitude doit passer par la bande-son. Ronronnement de la machine à laver, ronflement d’une camionnette dans laquelle les deux adolescents font un bout de chemin en auto-stop, tapage des machines de l’usine de saucissons locale : avant que d’entendre la musique, c’est par les bruits que le film nous donne à percevoir le tumulte d’un monde dont les adultes sont rejetés en bordure d’histoire et de cadre. Raconté par bribes, ce bref moment de retrouvailles entre les deux copains inséparables maintient dans le hors champ le cœur des événements. C’est toute la signification du geste de Théo qui demeure mystérieuse à ses propres yeux comme à ceux de son ami (a-t-il véritablement blessé sa petite sœur ?). Derrière les mensonges véniels (le faux itinéraire indiqué au DJ rencontré sur la route) se cache une interrogation sur la vérité de cet acte. Mais c’est aussi l’identité de Théo qui se voit mise en question à travers l’absence d’explications de ce qu’il a fait. Saisis toujours dans l’après ou dans l’à-côté, les événements peinent à trouver un sens défini. On n’entend pas un mot de la dispute qui éclate entre Théo et sa petite amie Mel, et lorsque Logan le trouve après cette crise, Théo a déjà allumé un feu dans le jardin de l’ami qui donne une fête pour y faire brûler ses papiers. Hébété, il contemple sa carte d’identité à moitié détruite par les flammes. L’incompréhension qu’ont, chacun à leur manière, les deux amis de cette bordure de la folie qui touche l’un d’eux, passe par une unité de temps et de lieu. Des retrouvailles en fin d’après-midi jusqu’au petit matin, Théo et Logan se livrent à un parcours dans la forêt qui est aussi une traversée de la nuit, aussi bien réelle que figurée. 

Raphaëlle Pireyre

Réalisation et scénario : Félix Imbert. Image : Teddy Boulangée. Montage : Marylou Vergez. Son : Elias Boughedir, Benjamin Silvestre et Jules Jasko. Musique originale : Antonin Dupety et Valentin Cambou. Interprétation : Jules Ritmanic, Sayyid El Alami, Fleur Fitoussi, Anouk Villemin, Salomé Partouche et Mathilde Lamusse. Production : G.R.E.C.

Avec l'aide de France 2.

Rencontre avec Félix Imbert, réalisateur du film Basses – Festival La Fête du court métrage 2019 :