En salles 07/11/2023

Pierre feuille pistolet, pour ne pas oublier l’Ukraine…

Présenté cette année à Cannes au sein de la sélection de l’ACID, ce premier long métrage d’un jeune cinéaste polonais offre un regard documentaire inédit sur la conflit en Ukraine, à travers des réfugiés cherchant à passer en Pologne, filmé dans l’habitacle de la voiture conduite par l’artiste lui-même. Intelligent et extrêmement fort.

Pierre feuille pistolet arrive dans les salles cette semaine, précédé d’une réputation flatteuse, qui n’est aucunement usurpée. Au-delà de la prouesse technique du parti pris de mise en scène, filmant la majeure partie du film depuis le siège avant du van conduit par le réalisateur pour évacuer des habitants de l’Ukraine fuyant la guerre, on s’incline à la fois devant la grande humanité de l’approche et l’émotion qui se dégage des confidences et des réactions sans filtres de ces innocent(e)s contraints à tout abandonner, dans le chaos et sans savoir pour combien de temps.

Souvent, un simple détail est bouleversant. Là, une grand-mère silencieuse écrasant une larme sous son fichu lorsque ses petits-enfants s’apprêtent à partir. Ou cette adolescente, dont le visage montre le choc lorsqu’elle apprend qu’une jeune femme a été violée au village par les soldats russes. Ou encore, évidemment, la petite fille qui ne sait plus jouer à “pierre, feuille, ciseau” sans dire systématiquement “pistolet” pour conclure. L’instant est à l’origine du titre français du film, qui s’intitule In the Rearview dans sa version internationale, et l’ampleur du traumatisme vécu ressort davantage avec ce choix de VF, pour un film qui émeut dans une totale sobriété.

Après avoir étudié la littérature française à l’Université Paris IV-Sorbonne et être passé par l’Eicar, à Paris, Maciek Hamela – qui est polonais – a réalisé deux courts métrages : Bonne chance en 2011 et un documentaire, Bless You / Prozdawiam, coréalisé avec Tatyana Chistova et récompensé à Cannes en 2021 dans la section “Cannes Docs”. Ses débuts sur le format long sont fracassants.

Christophe Chauville

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